Mai 27: On n'apprend que de ses échecs... Pas que !
Ou quand les succès contiennent une bombe à retardement.
La Phrase est un classique… ‘On n’apprend que de ses échecs’…
Si elle reste vraie dans bon nombre de cas lorsque l’échec fait l’objet d’une analyse objective et honnête, je suis de l’avis que l’on apprend autant sinon plus de ses réussites et qu'une analyse à froid objective permet bien souvent d'éviter de futurs échecs.
Si l’échec, dans l’entreprise en particulier, donne souvent sinon toujours lieu à une analyse ‘post mortem’, les succès eux, se suffisent souvent à eux même. C’est là que se cache un biais néfaste de notre façon de penser.
En effet, faîtes l’expérience. Pensez à un échec dans votre vie, privée ou professionnelle. Vous avez vraisemblablement déjà trouvé pourquoi quelque chose a mal tourné et quelles en sont les raisons. Maintenant, pensez à un succès. Vous êtes-vous posé la question ‘Pourquoi ai-je réussi ?’ ? Cela est beaucoup plus rare, et reconnaissons le, pas toujours facile de trouver les explications au succès.
Alors bien sûr, tous les poncifs trouveront leur place ; ‘J’ai fait ce qu’il faut’, ‘On était bien préparés’, etc. Mais est-ce tout ? Parfois, en creusant, on trouvera des paramètres moins excitants tels que ; ‘On a eu de la chance’, ‘Nous avons fait une erreur, mais finalement c’était mieux que le plan’, ‘Notre concurrent a merdé’ et plein d’autres.
C’est humain et naturel de considérer le bien comme normal, et le mal comme anormal. Pourtant, comprendre pourquoi on réussit est pour moi au moins aussi important que de savoir pourquoi ça n’a pas marché.
Imaginez un succès obtenu grâce à des paramètres non identifiés et non planifiés. Que se passera-t-il lorsque ces catalyseurs de succès changeront ou viendront tout simplement à disparaître ? Il y a fort à parier que l’échec n’est pas loin, et il sera temps alors d’entamer la fameuse analyse ‘post mortem’ qui éventuellement mettra en évidence les fameux paramètres, au prix d’un échec. N’aurait-il pas été plus judicieux de comprendre ‘a priori’ sans passer par la case ‘échec’ ?
Mon expérience dans ce domaine est constante et édifiante.
Je pense en particulier à ce cas alors que je travaillais pour une multinationale implantée en Chine. Il y a une bonne quinzaine d’années, cette entreprise enregistrait des croissances incroyables, supérieure à 15% par an. Mes collègues chinois remportaient tous les prix de réussite. Dans le même temps, les marchés européens se trainaient à 5 à 6 % et bien entendu, les européens dépensaient une énergie folle à comprendre pourquoi les taux de croissance étaient si faibles.
Lors d’un conseil d’administration, j’ai posé la question de savoir pourquoi la croissance de 15% en Chine était si exceptionnelle et si par hasard il n’était pas possible de faire mieux. Si les yeux de mes confrères présents avaient été des poignards, je ne serais pas là aujourd’hui à écrire…
Repositionnons-nous à cette époque. La croissance intrinsèque en Chine avoisinait les 15% l’an. En outre, nous étions de nouveaux entrants. Ce qui veut dire que notre part de marché était pour le moins modeste. Présenter une croissance (en pourcentage) alignée sur la croissance du moment, voulait simplement dire que nous ne progressions pas ! Les 5 à 6 % en Europe, dans une position plutôt dominante et sur un marché mature, en revanche, était une performance très honorable et de toutes évidences meilleurs que nos collègues Chinois.
Ma remarque iconoclaste ayant été balayée d’un revers de manche, ce qui devait arriver arriva.
Lorsque la croissance commença à ralentir en Chine, les taux de croissance ont sérieusement fléchis. Alors là, et seulement là, les ‘Growth Workshops’ et autres ‘Productivity Improvement Workshops’ ont fleuri, monopolisant des énergies importantes dans un environnement où les profits ayant chuté, il devenait plus compliqué de mettre en œuvre des actions de fond destinées à garantir une réèlle progression.
Ne vous méprenez pas, être aligné sur la croissance n’était en soi pas si mal. J’en ai connu qui ne réussissaient pas à suivre les taux de croissance faramineux chinois. Ceux-là ont pour la plupart disparus. L’exécution était correcte, mais l’aveuglement du taux élevé réalisé avait tout simplement conduit à négliger le long terme et l’éventuel retournement d’un des paramètres clefs de ce succès apparent.
Je pense également à cet exemple durant lequel je faisais partie d’une commission de suivi de développement d’un nouveau produit, principalement électronique. Le projet était novateur et la réussite du développement n’était pas acquise.
Un jour, lors d’une revue, les ingénieurs nous informent que le produit fonctionne parfaitement et remplit le cahier des charges. Tonnerre d’applaudissements, congratulations, et félicitations.
En bon empêcheur de se réjouir en rond, je pose la question de savoir ce qui a permis d’obtenir cet excellent résultat. Grand silence. Un ingénieur prend toutefois la parole et dit : « Nous avons trouvé un composant dont les caractéristiques non documentées permettent à l’ensemble de fonctionner ».
Des caractéristiques ‘non documentées’ ? Cela voulait tout simplement que la caractéristique qui avait permis à l’ensemble de fonctionner n’était pas contractuelle de la part du fournisseur et pouvait à tout moment disparaître, sans même que nous en soyons informés !
Les ingénieurs sont retournés à leur planche à dessin et ont finalement trouvé la solution, et cela de manière beaucoup sûre et pérenne.
Je n’entrerai pas dans la démonstration de la possible catastrophe économique que nous avons évité ce jour-là, mais l’exemple illustre bien que réussir, c’est bien, savoir pourquoi c’est mieux !
En conclusion je dirai qu’il est, bien sûr, clair que les échecs attirent notre attention, lorsqu’ils ne nous détruisent pas, et que leur analyse permet souvent d’apprendre. Mais que la parfaite compréhension des raisons d’un succès permet également d’apprendre et souvent dans de bien meilleures conditions car l’éventuelle pression financière et temporelle liée aux conséquences d’un échec n’est pas là.
Pensez-y la prochaine fois que tout le monde se réjouira autour de vous en célébrant la réussite d’un projet.
Si elle reste vraie dans bon nombre de cas lorsque l’échec fait l’objet d’une analyse objective et honnête, je suis de l’avis que l’on apprend autant sinon plus de ses réussites et qu'une analyse à froid objective permet bien souvent d'éviter de futurs échecs.
Si l’échec, dans l’entreprise en particulier, donne souvent sinon toujours lieu à une analyse ‘post mortem’, les succès eux, se suffisent souvent à eux même. C’est là que se cache un biais néfaste de notre façon de penser.
En effet, faîtes l’expérience. Pensez à un échec dans votre vie, privée ou professionnelle. Vous avez vraisemblablement déjà trouvé pourquoi quelque chose a mal tourné et quelles en sont les raisons. Maintenant, pensez à un succès. Vous êtes-vous posé la question ‘Pourquoi ai-je réussi ?’ ? Cela est beaucoup plus rare, et reconnaissons le, pas toujours facile de trouver les explications au succès.
Alors bien sûr, tous les poncifs trouveront leur place ; ‘J’ai fait ce qu’il faut’, ‘On était bien préparés’, etc. Mais est-ce tout ? Parfois, en creusant, on trouvera des paramètres moins excitants tels que ; ‘On a eu de la chance’, ‘Nous avons fait une erreur, mais finalement c’était mieux que le plan’, ‘Notre concurrent a merdé’ et plein d’autres.
C’est humain et naturel de considérer le bien comme normal, et le mal comme anormal. Pourtant, comprendre pourquoi on réussit est pour moi au moins aussi important que de savoir pourquoi ça n’a pas marché.
Imaginez un succès obtenu grâce à des paramètres non identifiés et non planifiés. Que se passera-t-il lorsque ces catalyseurs de succès changeront ou viendront tout simplement à disparaître ? Il y a fort à parier que l’échec n’est pas loin, et il sera temps alors d’entamer la fameuse analyse ‘post mortem’ qui éventuellement mettra en évidence les fameux paramètres, au prix d’un échec. N’aurait-il pas été plus judicieux de comprendre ‘a priori’ sans passer par la case ‘échec’ ?
Mon expérience dans ce domaine est constante et édifiante.
Je pense en particulier à ce cas alors que je travaillais pour une multinationale implantée en Chine. Il y a une bonne quinzaine d’années, cette entreprise enregistrait des croissances incroyables, supérieure à 15% par an. Mes collègues chinois remportaient tous les prix de réussite. Dans le même temps, les marchés européens se trainaient à 5 à 6 % et bien entendu, les européens dépensaient une énergie folle à comprendre pourquoi les taux de croissance étaient si faibles.
Lors d’un conseil d’administration, j’ai posé la question de savoir pourquoi la croissance de 15% en Chine était si exceptionnelle et si par hasard il n’était pas possible de faire mieux. Si les yeux de mes confrères présents avaient été des poignards, je ne serais pas là aujourd’hui à écrire…
Repositionnons-nous à cette époque. La croissance intrinsèque en Chine avoisinait les 15% l’an. En outre, nous étions de nouveaux entrants. Ce qui veut dire que notre part de marché était pour le moins modeste. Présenter une croissance (en pourcentage) alignée sur la croissance du moment, voulait simplement dire que nous ne progressions pas ! Les 5 à 6 % en Europe, dans une position plutôt dominante et sur un marché mature, en revanche, était une performance très honorable et de toutes évidences meilleurs que nos collègues Chinois.
Ma remarque iconoclaste ayant été balayée d’un revers de manche, ce qui devait arriver arriva.
Lorsque la croissance commença à ralentir en Chine, les taux de croissance ont sérieusement fléchis. Alors là, et seulement là, les ‘Growth Workshops’ et autres ‘Productivity Improvement Workshops’ ont fleuri, monopolisant des énergies importantes dans un environnement où les profits ayant chuté, il devenait plus compliqué de mettre en œuvre des actions de fond destinées à garantir une réèlle progression.
Ne vous méprenez pas, être aligné sur la croissance n’était en soi pas si mal. J’en ai connu qui ne réussissaient pas à suivre les taux de croissance faramineux chinois. Ceux-là ont pour la plupart disparus. L’exécution était correcte, mais l’aveuglement du taux élevé réalisé avait tout simplement conduit à négliger le long terme et l’éventuel retournement d’un des paramètres clefs de ce succès apparent.
Je pense également à cet exemple durant lequel je faisais partie d’une commission de suivi de développement d’un nouveau produit, principalement électronique. Le projet était novateur et la réussite du développement n’était pas acquise.
Un jour, lors d’une revue, les ingénieurs nous informent que le produit fonctionne parfaitement et remplit le cahier des charges. Tonnerre d’applaudissements, congratulations, et félicitations.
En bon empêcheur de se réjouir en rond, je pose la question de savoir ce qui a permis d’obtenir cet excellent résultat. Grand silence. Un ingénieur prend toutefois la parole et dit : « Nous avons trouvé un composant dont les caractéristiques non documentées permettent à l’ensemble de fonctionner ».
Des caractéristiques ‘non documentées’ ? Cela voulait tout simplement que la caractéristique qui avait permis à l’ensemble de fonctionner n’était pas contractuelle de la part du fournisseur et pouvait à tout moment disparaître, sans même que nous en soyons informés !
Les ingénieurs sont retournés à leur planche à dessin et ont finalement trouvé la solution, et cela de manière beaucoup sûre et pérenne.
Je n’entrerai pas dans la démonstration de la possible catastrophe économique que nous avons évité ce jour-là, mais l’exemple illustre bien que réussir, c’est bien, savoir pourquoi c’est mieux !
En conclusion je dirai qu’il est, bien sûr, clair que les échecs attirent notre attention, lorsqu’ils ne nous détruisent pas, et que leur analyse permet souvent d’apprendre. Mais que la parfaite compréhension des raisons d’un succès permet également d’apprendre et souvent dans de bien meilleures conditions car l’éventuelle pression financière et temporelle liée aux conséquences d’un échec n’est pas là.
Pensez-y la prochaine fois que tout le monde se réjouira autour de vous en célébrant la réussite d’un projet.
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